Il chercha désespérément à reprendre contenance, mais l'homme assis en face de lui avait bien perçu le trouble de Gabriel.
"Tatiana... comment va-t-elle ?
- Eh bien, si je suis venu vous voir, c'est qu'elle est morte."
L'univers de Gabriel trembla et s'effondra encore une fois.
"Mon Dieu ! Comment aurais-je pu imaginer ?
- Vous ne pouviez pas, monsieur Rochat, vous ne pouviez pas. Ma mère ne m'a annoncé les choses que dans son testament. Je ne savais rien de vous auparavant, et je croyais voir l'image de mon père dans un autre homme que vous.
- D'ailleurs, vous ne portez pas le nom de votre mère ?
- Non, après votre séparation, comme elle était enceinte, elle a préféré rentrer officiellement dans le rang, et elle a épousé un homme qu'elle qualifie d'insipide. Mais, d'une part, il n'était pas si gentil qu'elle le croyait, d'autre part, quand il a compris qu'il n'était pas mon père, il a quitté la maison sans retour, lui non plus.
- J'aurais aimé revenir...
- Je n'en sais rien, monsieur Rochat. Je ne vous connais pas, je ne sais d'ailleurs pas très bien si je souhaite vous connaître personnellement. Tant de choses viennent de se bousculer dans ma vie... Mais ma mère a insisté dans son testament pour que je vienne vous remettre une lettre et pour que je fasse appel à vous en cas de besoin. Alors je suis là."
Sylvain sortit une lettre cachetée de l'attaché-case avec lequel il était venu et la remit à Gabriel, qu'on aurait cru atteint d'un double syndrome de Parkinson et de deux de tension. Puis il reprit :
"Je vais vous laisser digérer tout cela, monsieur Rochat. Je comprends aisément que pour vous non plus, ce ne soit pas si simple d'apprendre tout cela.
- Donnez-moi tout de même vos coordonnées, j'aurai sans doute des choses à vous dire ou des questions à vous poser après avoir lu cette lettre... Quant au poste que vous demandez, vous me prenez un peu de court, mais je vais étudier la question. Je suis désolé, j'ai toujours rêvé d'avoir un fils, mais jamais de l'accueillir de cette façon...
- Très bien, de toutes façons, pour le moment, vous n'êtes pour moi qu'un éventuel employeur. Il m'est difficile de voir en vous le père que ma mère me présente alors même que je ne le cherchais pas. Je vous quitte donc, en attendant votre coup de téléphone." dit-il en posant un petit post-it griffonné dans l'instant avec un numéro de téléphone.
(à suivre...)
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