Un Fermier sur la terre
(section des poèmes nouveaux)
Il caresse la terre avec amour
La couvant des yeux tel un tendre amant
A tel point que sa femme en le regardant
Ne s'y tromperait pas : c'est pour toujours.
Confiant en l'avenir, les yeux pleins de promesses
Il aime voir mûrir les fruits de sa déesse.
Quand il mesure soudain l'étendue
De ses grands champs de terre qu'il laboure
C'est alors qu'il devient aveugle et sourd
Au monde autour de lui qui évolue.
Il pense à sa récolte, il pense à sa richesse
Il veut qu'on colporte les fruits de sa déesse.
Il sait que dans ses prés paîtront les vaches
Il pense à tout ce lait qu'il pourra vendre
Il travaille pour qu'au pré l'herbe tendre
Engraisse des produits que l'on s'arrache.
Il sait bien que la terre tient toujours promesse
A l'endroit, à l'envers, elle est une déesse.
Avec sa main puissante et abîmée
Il sent quand la terre a besoin de soin
En l'effritant, il ne se trompe point
Les yeux sur son pouce qu'il fait jouer.
Aucun effort trop grand pour soigner sa princesse
Au mépris de son temps, elle est bien sa déesse.
Elle lui procure la liberté −
Celle au-delà des contraintes terribles
Du changement à jamais impossible −
Qu'il faut à un homme pour exister.
Pas de repos jamais, interdit la paresse !
Il faut que le fermier respecte sa déesse.
Femme ne lui en veux pas trop quand même
S'il perdait sa terre il perdrait son âme
Ne pourrait plus entretenir sa dame
C'est pourquoi, tu vois, plus que toi, il l'aime.
Jalouse tu peux l'être car il n'a de cesse
Sans épargner son être, de choyer sa déesse.
Mais s'il ne l'avait pas, tu ne serais pas là.
© 2014, Opaline. Tous droits réservés, reproduction interdite.